Mangas et anime : royaume des émotions et reflet d’une époque
49 % des 10-14 ans lisent des mangas au moins de manière mensuelle, et 19 % des parents de moins de 45 ans en sont fans*.
Comment expliquer ce succès, que ce soit Naruto, One Piece, My Hero Academia, Kaiju et bien d’autres encore ?
Venu tout droit du Japon, ce genre littéraire a su séduire le public français de longue date, jeunes comme moins jeunes. Lisez plutôt : « le manga est le pilier du marché de la BD avec près de 40 millions d’exemplaires vendus en 2023, soit plus d’1 titre de bande-dessinée acheté sur 2 »**, avec plusieurs séries stars dépassant le million d’unités/an. Une catégorie extrêmement large, segmentée en 6 grands genres en fonction de l’âge et du sexe, où le SHÔNEN, destiné aux adolescents, représente environ 3/4 des ventes vs 20% pour le SEINEN, plus particulièrement prisé par les jeunes hommes un peu plus âgés**.
Loin de se limiter à l’illustration de scènes de combats d’arts martiaux (une image qui lui colle encore à la peau), le manga traite tous les sujets : de la comédie à la science-fiction, en passant par le drame, la romance, l’aventure ou de simples histoires de la vie quotidienne, multipliant les points de vue à travers une infinité de regards.
Dans des formats assez courts, avec l’avantage d’avoir peu de textes à lire, s’apparentant plus à du roman-feuilleton qu’à des histoires datées. Avec des séries pouvant atteindre plusieurs dizaines de tomes ! Les personnages y gagnent ainsi en profondeur, en ambiguïté et en intensité au fil des épisodes, affichant leurs propres contradictions, sortant ainsi du rôle de héros ou de super-héros « à l’occidental ».
Avec l’originalité d’un sens de lecture inversé, mais surtout la combinaison d’un traité graphique «extrême-oriental » et des scénarii grandement centrés sur la vie intérieure et les émotions des personnages, proposant au lecteur des histoires plus intrigantes, plus exploratoires … proches du roman, appelant parfois à de véritables arrêts sur lui-même, alors même qu’il est en plein dans l’âge de sa quête identitaire.
Un appel à l’introspection, au voyage intérieur grâce à la mise en scène de toute la palette des émotions, stylisées à travers les yeux surdimensionnés, mais aussi des codes visuels régissant le genre, comme la goutte de sueur en gros plan exprimant la tension, les traits d’ombrage sur les joues indiquant l’embarras, ou encore les lignes verticales barrant le visage d’un personnage honteux par exemple.
Prolongement de ce qu’avait initié le Club Dorothée dans les années 80, une génération plus tard, les plateformes de streaming ont largement contribué à populariser le genre auprès des amateurs, leur permettant de profiter des héros de leurs séries préférées sous une autre forme.
Véritables ambassadeurs de la culture japonaise, mangas et anime n’offrent toutefois pas qu’une vision unique du pays du Soleil Levant. Ils sont aussi appréciés par leurs lecteurs parce qu’ils abordent nombre de leurs préoccupations du moment, comme leur désarroi face aux soucis écologiques ou aux diverses formes de harcèlement par exemple. Permettant aussi un début de réflexion sur l’organisation de la société, comme par exemple la dénonciation du pouvoir de l’entreprise. Des sujets qui résonnent aux oreilles d’une génération soucieuse de donner du sens aux activités qu’elle entreprend, avec toute la richesse de l’ambivalence liée au mix du raffinement et du respect des traditions, en même temps que l’attrait pour la technologie avant-gardiste. Une ouverture sur le monde et à la réflexion sur notre époque.
Autant de raisons justifiant la distinction reçue par la tablette lumineuse Dessinéo Manga lors de l’édition 2024 des Étoiles du Jouet.
*Source : baromètre Junior#Crush – édition 2024 – terrains réalisés en janvier et avril 2024.
**Source : panel distributeur Gfk.