24% … pour faire genre !

Près du 1/4 des enfants de 5-6 ans ont déjà vu au moins un épisode de la série Chouette pas chouette*.

Chouette pas chouette est une série animée de 16 épisodes courts, diffusés depuis la mi-janvier 2021 dans les programmes jeunesse de la majorité des grandes chaînes TV et sur l’application ludo-éducative Bayam. Sa réalisation et sa multidiffusion sont le résultat d’une mobilisation collective de producteurs & de diffuseurs destinée à sensibiliser les plus jeunes enfants à la lutte contre le sexisme et au respect de la différence, cette initiative venant s’inscrire dans le cadre des actions de lutte contre la violence faites aux femmes. Plus on prend tôt le « mâle » à la racine pour déconstruire les stéréotypes sexistes… mieux c’est !

L’ambition du programme est de faire prendre conscience aux enfants à partir de 3-4 ans que les filles et les garçons sont égaux (il n’y a pas d’activités réservées aux un(e)s plutôt qu’aux autres) et que les différences doivent être respectées. Et c’est bien ! Mais au-delà de sa vertu « éduco-civique » (sic !), l’initiative permet de nourrir le débat sur le genre, en militant en faveur de l’égalité et de la mixité, sans pour autant ignorer ni vouloir effacer les différences.

Car à force de trop vouloir égaliser… ne risque-t-on pas d’y perdre sa nature et sa personnalité ? Que penser de l’abandon du patronyme Mister par Potaoe Head ou de l’écriture inclusive systématisée sous couvert d’égalité des sexes ? Si l’un y perd son genre avec son attribut masculin, alors qu’au sein même de la gamme de produits il y aura vraisemblablement toujours des « Monsieur » et des « Madame »… on arrive aussi à y perdre son latin lorsqu’il y trop de mots doublés avec des slashs ou complétés avec des .e ou des (e)… afin de scrupuleusement respecter la pluralité.

Difficile débat, où à force de se prendre au jeu… on se prend aussi la tête… et on arrive à en craindre à terme pour nos héros et pour nos marques.

Dans un monde sans genre… imaginez ce que pourraient bien devenir Mr & Mme Smith, Bean, Doubtfire ? Où Hulot irait-il en vacances ? Que deviendrait Propre… avec ce coup de balai ?
Sans oublier Freeze, Meuble ou Bricolage ? Prince… est-il condamné à se fondre en Altesse de Lu… ? Et P’tit Écolier… ? Quant à Ben’s… à quelle sauce va-t-il bien pouvoir être mangé ? Mamie Nova va-t-elle devoir rendre son tablier ?

Bleu pour les garçons, rose pour les filles… le cliché est bien évidemment révolu, avec des générations de parents pour lesquels le X ou le Y ne sont plus un curseur, ni une problématique, dans un monde où le mariage pour tous a même trouvé sa place.

Mais, que ce soit en bleu ou en rose, n’oublions pas que les garçons ont besoin à un moment ou à un autre d’affirmer leur virilité, et les filles d’exprimer leur instinct nourricier.  C’est sûrement pourquoi dans l’offre jouet, il y a et il y aura… sûrement toujours des poupées avec des paillettes de princesses d’un côté & des super-héros musclés de l’autre, sans que cela soit discriminant pour autant, ni que cela empêche les filles de s’intéresser aux petites voitures ou aux jeux de construction de leurs frères, ni les garçons de jouer à la dinette ou à la marchand(e)… sans aller contre nature pour autant.

Auteur Yves Cognard, CEO ycognard@juniorcity.fr

Article paru dans La Revue du Jouet, Mars 2021

*Source sondage ad’hoc- Junior City, 314 enfants de 3-6 ans & leurs parents interrogés entre le 20 & le 25 février 2021.